Complément d'humeur

Vivre me prend tout mon temps

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Traverse des 400 couverts

Grenoble, c'est grand, c'est rond, c'est bien. Enfin... c'est dans une cuvette, et régulièrement on voit les montagnes dans l'alignement des rues. C'est plein de squatteureuses - la seule ville de France où on ne peut pas se promener dix minutes sans en croiser, faut dire que le FRAKA et la fin de la trêve d'hiver ont amené ici des gens de Nantes, Lilles, Barcelone, Dijon, Besançon, enfin bref de partout. Et surtout, c'est bel et bien à l'heure actuelle LA ville des squats, avec un mouvement très fort et vivant.

Pour l'instant, je n'ai vu que les 400 couverts : une traverse en centre-ville, intégralement squattée - comme une ville dans la ville, où les gens vivent autrement. Elle comporte le Chapitônom, superbe salle de spectacles, le 9 qui sert de salle de danse, le 8 bis et le 10 qui sont des habitations collectives... le tout superbement décoré par des matériaux de récup, peint, carrellé de mille couleurs, fleuri, parsemé de petites lumières le soir. Une rue autogérée, qui n'est pas sans rappeller les quartiers autogérés de l'Italie des années 70...

Je compte aussi visiter la Loupiote, mais je vous en parlerai à ce moment-là.

Et enfin, il y a la Flibustière, squat de femmes non-mixte - je vais leur rendre visite bientôt, parce que ce choix me semble très interessant. Vivre entre femmes, c'est ne plus être dépendante des hommes pour les travaux et les tâches de force, c'est ne pas subir leur tendance à s'affirmer bruyamment pendant les réunions, et aussi ne plus être objet du désir masculin... et ces filles se sont également très bien intégrées dans le quartier, permettant à beaucoup d'autres femmes de se retrouver entre elles. Je ne crois pas que je ferais ce choix de vie, mais il peut avoir beaucoup à m'apprendre.

Qu'ai-je fait durant ce festival? Bel et bien loupé la conférence de Kyior sur les situationnistes, mais récupéré une brochure à ce sujet. Entendu parler de l'"Action Mondiale des Peuples". Dévoré plein de textes féministes, et notamment le SCUM Manifesto de Valerie Solanas, dont voici le premier paragraphe :

Vivre dans cette société, c’est au mieux y mourir d’ennui. Rien dans cette société ne concerne les femmes. Alors, à toutes celles qui ont un brin de civisme, le sens des responsabilités et celui de la rigolade, il ne reste qu’à renverser le gouvernement, en finir avec l’argent, instaurer l’automation à tous les niveaux et supprimer le sexe masculin.

Tout le texte est aussi violent, drôle et juste. A lire absolument...

Sinon, j'ai dormi beaucoup, parlé avec tout le monde, joué et ri, fait des câlins et des tâches collectives, enfin c'est un super festival.

Bon, c'est pas tout ça mais y'a une manif qui commence...

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Commentaires

1. Le jeudi 29 avril 2004 à 23:43, par Bap*

Dis moi, Veig', tout ce petit monde ne se regarderait-il pas le nombril à longueur de journée ? (je précise que ce n'est pas une question méchante ou ironique mais une vraie question que je me pose)

2. Le vendredi 30 avril 2004 à 01:15, par UnLunar

La réponse est bien-etendu affirmative. Tout cet immense bazzar n'est qu'une gigantesque expérimentation collective. Il faut l'analyser en permanence, avoir des idées, mettre en pratique, analyser de nouveau.

Et ça n'empêche en rien de faire d'autres choses !

3. Le vendredi 30 avril 2004 à 01:25, par Solveig

He bien... ça dépend de ce que tu entends par là. Les activités du festival sont ouvertes à tous et toutes, et des gens très différents viennent y participer. Les squatteureuses sont eux-mêmes très variés et vivent leurs différences. Et non, on ne passe pas notre temps assis, le fait de ne pas travailler permet au contraire d'entreprendre des activités variées, utiles et ludiques. CertainEs mènent des réflexions qu'ils diffusent (ou non) sous forme de brochures, certainEs améliorent l'infrastructure des lieux (réseau informatique, électricité, jardinage). Et puis, ici, l'art n'est pas un élément séparé de la vie, il s'exerce dans beaucoup d'activités du quotidien...
Je ne sais même pas si j'ai répondu à ta question ;)

4. Le samedi 1 mai 2004 à 23:50, par djrom

Tiens, tiens, trois constatations:
1. visiblement, tu t'es remise de ta période de non-bloggage intensif, c'est toujours agréable de retrouver ta prose. Même quand on te parle en vrai, c'est pas pareil.
2. chic, enfin trouvé quelqu'un-e qui aime aussi le SCUM manifesto, c'est formidable.
3. t'as une manière très jolie de causer de ce gentil (petit) "milieu", tiens. Un peu de poésie dans ce monde de brutes ...
4. (oui quatre, finalement) c'est vite fait de dévenir accro aux blogs quand même hein, même quand on résiste farouchement. Aïe aïe, une dépendance de plus, la vie devient dure.

5. Le mardi 4 mai 2004 à 01:28, par Bap*

Merci des réponses :) En fait ce que je voulais dire (je précise ma pensée) c'est : en se mettant "à côté du monde", tout ce "milieu du squat" ne finit-il par par tourner en circuit fermé et perdre la notion de sa propre révolution ? Une révolution ancrée dans la réalité de notre société.

6. Le mardi 4 mai 2004 à 09:41, par christelle

Bonne question dont j'aimerai connaitre aussi ta réponse ...

7. Le mercredi 5 mai 2004 à 01:10, par djrom

J'crois qu'on peut faire la même réponse à cette question que celle qu'a fait Lunar à la première: évidemment oui. Comme tout milieu, ce joli "milieu du squat" peut finir très facilement par tourner en rond sur lui-même, mais ce qui le sauve (enfin pour l'instant, je crois), c'est que le monde autour tape
constamment contre la bulle, et du coup la force à se déplacer, à se déchirer, à s'ouvrir pour pouvoir mieux se reconstituer ensuite. En somme, la réponse est dans la question, les squats, espaces autogérés et autres lieux de ce genre ne sont pas "à côté du monde", ils sont en plein dedans, et du coup, plus ce milieu essaie de révolutionner ce monde, plus il se révolutionne lui-même.

Un autre élément de réponse est peut-être qu'il n'y a pas *un* milieu squat, mais de multiples réalités fractionnées en fonction de l'espace, du temps, des affinités, ... Et comme le nomadisme est autorisé et facilité entre ces différentes réalités, il y a apports, dons, échanges et bouillonnements constant dans tout le gros machin qu'on pourrait appeller le "milieu squat". D'où des frictions parfois, mais aussi beaucoup de dynamisme et d'évolution (souvent).

8. Le mercredi 5 mai 2004 à 13:47, par Bap*

Très interessant.
Merci Dj.

9. Le mercredi 12 mai 2004 à 16:57, par Solveig

> djrom : tu es embauché. Ca tombe bien, j'avais besoin d'un support technique...

(c'est cool, ce wiki devient réellement coopératif)

10. Le mercredi 12 mai 2004 à 19:56, par Kobal2

Tout d'abord, un message de nos sponsors : Bon, Tu Postes, Pédé ?

Ensuite... Non rien. Je serais une grosse midinette faible et dépendante affective, je dirais que tu me manques beaucoup. Mais je suis pas ça. Et j'ai beaucoup trop de fierté pour dire ça. Beaucoup trop. Hein ?

11. Le mercredi 12 mai 2004 à 20:04, par djrom

Solveig: chuis super content, j'venais d'envoyer le CV et la lettre de motivation, et j'ai déjà la réponse ! T'es vraiment une super DRH quand même :)

12. Le samedi 15 mai 2004 à 18:37, par ????

<djrom
Ah le hasard de la vie

13. Le vendredi 21 mai 2004 à 03:09, par korafetish

Juste pour dire, et rentrer en retard dans cette discussion que je pense que le milieu squat brasse sans doute dix fois plus que les "milieux" dits étudiant, salarié, chomeur, ou autre "milieu(?)". Déjà c'est une vie collective, en plus, ce sont souvent des lieux de passages et d'activités...Alors même si les gens se ressemblent sur des points, quand dans la journée t'as croisé 25 à 30 personnes, fait une réunion à 18 et mangé avec 14 personnes le soir (et pas forcement les mêmes qu'à la réu.), et que ça c'est ton quotidien, tu te sens pas replié sur toi... Enfin, je dis ça de mon ressenti propre entre mes expériences de squatteur et de locataire. Bises à celleux que je connaîtrai sans le savoir...

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Présentation

J'ai commencé à ouvrir les pages de mon carnet intime lors de mon passage à la non-exclusivité amoureuse, parce que j'avais besoin de poser des mots sur ce que je vivais et de le partager. J'aime garder ici des traces de moi, parce que je suis souvent surprise de retrouver longtemps après quelles furent mes pensées et émotions à un moment donné... ma démarche ignore toute pudeur, soyez prévenu.e.s. Ainsi donc, voici mes amours, ma vie en squat, et quelques réflexions politiques.