Complément d'humeur

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Grammaire féminisée

Explication en première page de toutes le bonnes brochures :
Par " féminiser " le langage, on entend bousculer cette bonne vieille grammaire, qui voudrait faire primer le masculin sur le féminin. Cet état de fait n’est pas anodin. Le langage est un reflet de notre société patriarcale : il entretient la domination d’un genre sur l’autre. Parce qu’il est notre premier mode d’expression, il a une fonction fondamentale, et peut être utilisé à bien des fins. S’il est structuré, le langage est également structurant : il conditionne notre pensée, la formate, il guide notre vision du monde. Remodeler le langage c’est refuser une domination, construire d’autres inconscients collectifs.

J'aime bien cette explication, mais je vais développer.
D'accord, la féminisation du français est étrange - puisque nouvelle. Cela signifie-t'elle qu'elle soit mauvaise ? Pas si sürE. La langue est un outil de communication, et comme tous les outils, elle nécessite d'être adaptée à l'usage qu'on veut en faire. Ainsi, le langage SMS pour des communications rapides n'est cependant pas adapté aux discussions philosophiques, ou les langues ultra-spécialisées hermétiques aux non-initiés (informatique comprise), permettent d'affiner les concepts/recherches dans un domaine mais pas d'expliquer un exo de maths à unE enfant.
CertainEs conservateurices voudraient figer le langage, et trouvent que toute modification est "laide", prétendent ne pas pouvoir lire un texte féminisé. Alors... un texte mal féminisé est difficilement lisible, de même qu'un texte mal orthographié, par contre lorsque c'est bien fait, le temps d'adaptation est très court.

Et surtout, il y a de bonnes raisons pour féminiser. La langue formate la pensée : on ne pense pas pareil en français, anglais, allemand (pour ne citer que les langues dans lesquelles il m'arrive de penser). La pensée arrive à la conscience sous forme de mots, et ces mots imposent leurs contraintes à la pensée. Or oui, il y a d'autres luttes importantes pour les femmes, il suffit de penser au harcèlement sexuel, aux différences de salaires, au manque de crèches ou au peu de femmes à des postes de pouvoir. Mais je ne pense pas que la langue soit accessoire : grandir dans un environnement qui les exclut des rôles "dominants" (docteur, professeur, auteur, chef...) et invisibilise leur présence dans des groupes mixtes est certainement une bonne façon d'inculquer aux femmes à se taire et rester derrière. La masculinisation a cet effet : si je vous dis "docteur" ou "procureur", votre représentation mentale sera un homme. Cela influe sur la façon dont on se construit...
Le français ne connait pas de neutre pour dépasser ce clivage masculin/féminin. Alors ce qui s'appelle féminisation de la langue est en fait une "universalisation". Ainsi, un masculin pluriel reste un masculin pluriel ("ils ont un pénis"), par contre un pluriel mixte arrête de nier la présence de femmes ("ils/elles viennent demain").

Comment féminiser ?

ChacunE utilisera la forme qui lui convient. Par contre, je conseille de choisir une forme et de s'y tenir à l'intérieur du texte.

- les pronoms :

  • singulier (pour parler d'une personne de sexe indéfini) : ille, el
  • pluriel (groupe mixte) : illes, els, ils/elles

- les noms :
ça dépend de la forme :

  • terminaison en -eur, -euse donnera "amoureureuse" ou "amoureux/reuses"
  • terminaison en -er, -ère donnera "postier/ère" ou simplement "postièrE"
  • terminaison qui prend un -e : on le marque, ainsi "amiE", "ami(e)", "ami-e"...(si l'on se contente d'écrire "amie", c'est un féminin donc ça ne dégenre pas, m'enfin certainEs utilisent la féminisation systématique pour contrebalancer la masculinisation)

Ainsi de suite, et puis c'est un peu selon votre imagination et vos préférences. Après tout, la langue que vous utilisez est votre outil !

- les articles :
un/une, unE, un(e), un-e
le/la, lea, lae

- les accords :

  • en français, la plupart des adjectifs prennent un -e au féminin, donc comme sur les noms ci-dessus : au choix, on rencontre "intelligentE", "intelligent(e)", "intelligent-e" - parfois, le féminin rajoute une/des lettre(s) : "francHE", "violetTE"...
  • pour les adjectifs qui changent de forme, le plus courant est de mettre les deux : ainsi "beau/belle" (quoiqu'ici on pourrait mettre "belLE"), "courageux/euse"...
  • certains adjectifs sont neutres : juste, étrange, féroce, humanitaire, égoïste, équivoque...

Plus tous les petits mots : quelqu'unE, certainEs, chacunE, touTEs,...

Maintenant, c'est de lire un texte qui m'exclut qui me gêne. Habituez vos yeux !

Sexisme et grammaires scolaires
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Commentaires

1. Le samedi 6 novembre 2004 à 11:13, par Le hasard

(C'est marrant, tu recommences à parler de trucs qui me font réagir)

Je ne vais pas me plaindre de lire un texte féminisé, je trouve ça tout à fait lisible, et je sais ou ils sont l'usage, alors si ça me dérangeait, il me suffirait d'éviter ces lieux et milieux. Mais je tenais à insister sur le fait que, linguistiquement parlant, si on remonte au latin, ce n'est pas le masculin qui l'emporte, c'est le neutre, bien qu'avec les ellipses dues à l'usage, les deux en sont venus à se confondre.
Evidemment, je ne reproche pas les gens de vouloir faire evoluer la langue française - il n'y a rien de pire, qu'une langue gelée - il me semble juste que dans le cas précis, c'est du pinaillage. Il y a d'autres questions plus importantes à se poser, AMHA.

2. Le samedi 6 novembre 2004 à 14:13, par Eve

En ce moment ce qui m'agace c'est la féminisation abusive. Hier soir je regardais un documentaire la façon dont les loups sont devenus chiens.
Quand le type a dit : "Ceux qui répondaient mieux aux désirs des hommes ont été mieux nourris, ils avaient donc plus de chance de trouver UNE partenaire et de se reproduire", j'ai grogné très fort.
Pourquoi le féminin l'emporte t'il quand ça colle avec les schémas mentaux de ces messieurs ?

3. Le samedi 6 novembre 2004 à 14:50, par Le hasard

Parce que vazy pour que deux mâles se reproduisent ensembles =)

4. Le samedi 6 novembre 2004 à 15:53, par Eve

Ah bravo !
Tu interprête "Ceux" forcement au masculin, alors qu'il n'y a aucune raison pour que seuls les chiens mâles soient concernés..

5. Le samedi 6 novembre 2004 à 16:32, par korafetish

Le hasard: L'avantage de la réflexion sur la féminisation des textes que nous re-produisons, c'est qu'elle ne parasite pas les réflexions inhérentes aux textes en questions, elle doit juste s'y intègrer (rajouter).
(Re)écrire un texte féminisé n'empèche pas qu'il parle d'autres choses que de la féminisation qu'il comporte...Tu penses, tu écris un truc, et tu le féminises...
C'est simple comme un coup de fil-LE.
Mouarf, je sors...

6. Le samedi 6 novembre 2004 à 20:57, par Le hasard

Eve > Putain, c'était de l'humour... Je vais finir par plus vous adresser la parole, si vous continuez à être bornés comme ça, tous.

Anneric > Je n'ai absolument rien contre la féminisation des textes, en fait. Je ne compte pas le faire, c'est tout. C'est comme arrêter de m'épiler parce que dictature masculine machin-chose. J'ai l'habitude de faire comme je fais, j'ai pas envie de changer. Les gens font ce qu'ils veulent, et ils ont le droit d'essayer de me convaincre. Mais me dire "Si tu fais pas comme ça, alors c'est mal", moi ça me donne envie de foutre des baffes.

En fait c'est ça qui me gêne, dans le militantisme : c'est que ça conduit _aussi_ à l'intolérance.

(Ca c'est du bon gros troll qui tâche... Mais je le pense, alors je le dis.)
(Sinon c'est marqué "Enregister" sur le bouton, faudra penser à rajouter le "r" hein.)

7. Le lundi 8 novembre 2004 à 06:09, par kyi

Boaâf, j'ai même pas envie de prendre la peine de répondre "au hasard"... Je ne suis pas sûr que le problème soit une question d'humour ceci dit. Je trouvais la remarque d'Eve assez "marrante" et pertinente à la fois donc si ton sens de l'humour était si aiguisé que ça t'aurais peut-être pas pris la mouche comme ça... Enfin bref, lisez aussi ces quelques notes sur la féminisation des textes (vous allez voir c'est pas long du tout):

http://infokiosques.net/48

8. Le lundi 8 novembre 2004 à 10:54, par Le hasard

Spa moi qui ait pris la mouche couillonNE, c'est Eve.
Bon de toutes façons je sens que je vais couper les ponts avec tout ce bordel, Solveig m'avait montré le chemin en me reléguant au rang de quantité négligeable, moi je vais renoncer à essayer de communiquer avec des gens qui, parce que MOI je ne rentre pas dans leur shémas à eux, me prennent pour une conne.

Alors oui, je suis pas féministe, oui je me contrefous qu'on parle des chiens au masculin dans un foutu documentaire, et alors ? Moi, je ne rejette rien, je comprend la lutte, je ne la trouve pas illégitime : juste, moi, je ne m'y interesse pas assez pour faire autre chose que des sales vannes sur le sujet.
Vous pronez la tolérance, mais vous rejetez en bloc ceux qui n'ont pas les mêmes opinions que vous, vous me faites doucement rigoler...

Regardez vous un peu, avant de vouloir changer le monde : charité bien ordonnée commence par soi-même.

9. Le jeudi 11 novembre 2004 à 04:10, par korafetish

Charité (chrétienne?)
[Alors là, je pense que c'est la vanne de trop, pardon, mais j'ai pas pu me retenir...]
Eh Nac', tant pis...:(

10. Le jeudi 11 novembre 2004 à 12:24, par Le hasard

De trop, non, ça va.

S'il y avait quelque chose de trop, à la limite, c'était mon commentaire.
Mais bon, trop tard pour le retirer, ridicule de le renier... Alors j'assume =)
Nan et puis je dois dire qu'avoir été traité comme une chose qu'on jette quand on en a marre et qu'on prend quand on en a envie par quelqu'unE qui prétend défendre des idées féministes, c'est à la fois vexant et drôle. (Je pense que maintenant Solveig me déteste, mais j'aimerais bien la voir réagir, parce que son absence de réaction me conforte encore plus dans mon idée qu'elle n'en a rien à foutre de moi).

Tant pis pour ?

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Présentation

J'ai commencé à ouvrir les pages de mon carnet intime lors de mon passage à la non-exclusivité amoureuse, parce que j'avais besoin de poser des mots sur ce que je vivais et de le partager. J'aime garder ici des traces de moi, parce que je suis souvent surprise de retrouver longtemps après quelles furent mes pensées et émotions à un moment donné... ma démarche ignore toute pudeur, soyez prévenu.e.s. Ainsi donc, voici mes amours, ma vie en squat, et quelques réflexions politiques.