Complément d'humeur

Vivre me prend tout mon temps

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mardi 21 octobre 2003

Mauvais aiguillage

Les mots glissent sous mes doigts et l'écran en est tout barbouillé. J'échoue à formuler ce dont je voulais parler. Mais l'écriture automatique a du bon, parfois.

Alors je vous raconterai le Bonheur lorsqu'il sera moins timide et qu'il osera venir ici. Je vous laisse Peur et Colère pour ce soir. Bonne nuit.

Chant d'une sirène

En fait, je voulais parler des bonheurs, je n'ai explicité que l'écartellement. A quoi tous les bien-pensants me diront que la fidélité est le seul moyen d'aimer, tout ça. Que je suis une idiote de rêver que c'est possible, que je dois choisir. Comme c'est matérialiste! Comme c'est pétri de mesquinerie. J'aime, et je compte au-delà de trois. Vous me jetez vos conventions à la gueule, vous me faites chier. Si je voulais entendre ce discours, j'ouvrirais un manuel de savoir-vivre, ou même j'écouterais Christine Boutin. Non ce ne sont pas de fausses amours parce qu'elles sont multiples, d'ailleurs le mot "amour" est toujours plus beau au féminin. Non je n'ai pas de préférence, et je ne veux pas de rationalité dans mes sentiments. Et puis ceux qui tiennent ce language sont toujours les plus malheureux, allez savoir pourquoi. Je préfère me sentir étrangère à moi-même et à mes sentiments qu'adopter les préformatés qu'on nous propose. Comme pour les enveloppes, je hais les pré-timbrées. Au moins, dans ce pays étranger que sont mon coeur et ses élans, il y a des choses à découvrir. A chaque virage un nouvel éblouissement, sur chaque route un nouvel ami(ant), de chaque falaise une vue splendide. Et qu'importe si je suis perdue, lorsque j'en aurai marre d'errer, je demanderai "la station de métro la plus proche, s'il-vous-plaît". Ah non, je fermerai les yeux et je laisserai les fées me raccompagner à la maison, qui sera n'importe quel endroit où me poser quelques jours pour faire le point. Avant un nouveau voyage, oui.

Vous m'effrayez, vous qui restez toujours au même endroit. Vous n'en avez pas marre de contempler toujours les mêmes murs, enfermés à l'intérieur de votre tête par peur de la perdre? Que la Folie est douce, tendres ses mains qui me bercent parfois et harmonieuse sa voix lorsqu'elle conte des histoires. Elle n'est pas une prison, juste une échappatoire. Je lui ouvre ma porte souvent, parfois même nous sortons nous promener ensemble. Et chastement elle me raccompagne, après que je lui eusse laissé tous mes soucis en gage. Ensuite, je les reprends peu à peu, pour les régler un par un. Elle serait mon ange gardien, si j'en avais un. Et vous, monstres de rationnalité, ne vous croyez pas protégés. Celui qui ne partage rien avec elle de son plein gré, souvent s'y retrouve fiancé.

Ecartelée

Je ne poste pas beaucoup, je ne parle pas beaucoup de moi et de toutes les choses qui m'arrivent en ce moment. Le monde ne s'en porte pas plus mal, soit, mais ça me manque, j'ai besoin de faire le point avec vous, et surtout face à moi, de temps en temps.

Lucy m'a dit que l'expression "écartelée entre trop de bonheurs" était choquante. Ce n'était pas le but. Ou pas vraiment, en tous cas. On en a parlé ce midi, et ça m'a fait du bien, d'exposer à une personne extérieure tous ces sentiments, tous ces désirs et angoisses qui se chamaillent en moi. J'ai répété plein de fois que je suis heureuse. Et je le suis, la vie est belle, je suis entourée de personnes merveilleuses qui, en plus, m'aiment. La vie est belle, quoi.

Oui mais. Mais je passe mon temps à courir pour voir tout le monde - oui, c'est vrai, j'adore ça, mais c'est épuisant et mon réveil sonne dans le vide le matin, ces jours-ci. Mais même comme ça je ne peux donner que peu de temps à chacun, et c'est frustrant à force, pour eux et pour moi. Sans parler des amis que je néglige depuis trop longtemps... Mais je suis coincée entre des tensions qui ne me concernent pas et que je rêve d'arranger, sans espoir malheureusement - et j'ai peur de trahir, je me surveille pour ne pas répéter ce qui m'est confié et j'essaie malgré tout d'être une amie pour chacun, en lui disant ce qui peut l'aider. Mais je me sens peu à peu détachée de ces sentiments, tiens lapsus révélateur pour {mes} sentiments, à force de les garder en laisse pour ne pas brusquer ou envahir, à force de les surveiller pour leur garder leur fraîcheur, à force de jongler avec les éclats de ma vie comme un troubadour maladroit et cependant consciencieux, et je m'étonne d'en avoir laissé tomber si peu - l'écriture, ici, dans mon carnet ou à mes amis ; le sommeil qui se passe très bien de moi ; mes amitiés que je ramasserai, je l'espère, lorsque j'aurai un moment, si elles n'ont pas roulé au loin ; mon foyer, mais après tout je suis un coucou, chez moi partout et nulle part ; les voyages, mais après tout l'herbe n'est jamais plus verte ailleurs, paraît-il ; mes divertissements idiots, mais quand je serai vieille je pourrai bien faire de la broderie, de l'origami, et voir plein de concerts ; la glandouille que j'ai pratiquée si longtemps que finalement, fallait bien que je passe à autre chose, non?

Ecartelée, non pas entre quatre chevaux, mais entre quatre amours. Oh non, nul n'est trop exigeant. Et oui, ils m'apportent du bonheur, de la joie, de l'écoute, du plaisir. Mais je sature. Trop-plein d'émotions qui me fait m'en détacher, et je les regarde de loin, admirative, émerveillée, jouant juste ce jeu de l'amour qui ne doit plus rien au hasard puisque privé de spontanéité. Je m'en veux de ne pas pouvoir leur offrir tout ce qu'ils méritent, j'incarne WonderWoman avec une certaine crédibilité mais je sens les failles s'élargir, doucement et en silence s'il-vous-plaît, surtout n'interrompez pas le spectacle pour moi.

Bien sûr je devrais en parler, le montrer. Mais on a si peu de temps ensemble, pourquoi le perdre en parlottes? Et puis après tout, s'ils ne le devinent pas, dois-je vraiment l'exhiber? Et les confidences que je ferais à l'un, pourquoi l'autre ne les entendrait pas, et ne s'en offusquerait-t-il pas? Et puis surtout, je suis pudique, vous savez. Ni pour mon corps, ni pour mes sentiments. Juste pour mes peurs, celles qui rongent en cachette le décor splendide de cette fête. Alors je les retiens, les couvre, leur coupe la parole dans un flot ininterrompu de mots sans signification, oui je dis beaucoup trop "je t'aime", oui j'aborde toutes les futilités qui me viennent à l'esprit, oui je chante (faux) et je ris (fort). Trop faux, trop fort. Ou pas encore assez, puisque je finis toujours, ici ou ailleurs, par vomir cette bouillie ignoble de peurs et de reproches-qui-n'en-sont-pas, et par blesser. Tous, ils vont se sentir coupables, et je m'en veux déjà. Tous ils vont vouloir m'aider, me demander de leur parler, mais je n'en ai pas besoin, finalement. Puisque ça y est, c'est sorti. Puisque je suis heureuse. Puisque vous m'aimez, pourquoi revenir là-dessus? Ces peurs n'ont jamais existé que dans mon imagination. Tout va pour le mieux, et reprenons un martini. Bien sûr, c'est promis, la prochaine fois j'en parlerai.

Bien sûr je mens, jetez-moi donc la première pierre. Veillez à ce que ce soit un galet. Et vous m'accorderez bien cette danse?

Présentation

J'ai commencé à ouvrir les pages de mon carnet intime lors de mon passage à la non-exclusivité amoureuse, parce que j'avais besoin de poser des mots sur ce que je vivais et de le partager. J'aime garder ici des traces de moi, parce que je suis souvent surprise de retrouver longtemps après quelles furent mes pensées et émotions à un moment donné... ma démarche ignore toute pudeur, soyez prévenu.e.s. Ainsi donc, voici mes amours, ma vie en squat, et quelques réflexions politiques.